Saint-Barthélemy – Les amendements du Député Gibbs font l’unanimité à l’Assemblée
Malgré des débats houleux en commission des Lois la semaine précédente puis d’intenses pourparlers avec parlementaires et gouvernement, la proposition de loi organique portant diverses dispositions relatives à la collectivité de Saint-Barthélemy a été adoptée selon la volonté du député de Saint-Barthélemy et Saint-Martin.
Daniel Gibbs “arrache” ainsi en séance publique un dispositif permettant à la Collectivité de pouvoir bénéficier à terme d’une caisse locale de Sécurité sociale ; il donne également à Saint-Barthélemy le moyen d’engager un bras de fer digne de ce nom avec l’Etat pour qu’il respecte les délais en matière de décrets.
Jeudi dernier, l’ordre du jour de l’Assemblée nationale appelait la discussion de la proposition de loi organique, adoptée par le Sénat, portant diverses dispositions relatives à la collectivité de Saint-Barthélemy et déposée par le sénateur Michel Magras.
Un texte s’inscrivant dans le sens de la nécessaire actualisation du statut de la jeune Collectivité d’outremer, en lui permettant à la fois d’étendre modestement les compétences exercées par la COM mais aussi d’assouplir son fonctionnement institutionnel.
Si les questions institutionnelles ne soulevaient aucune difficulté particulière, deux dispositifs – ayant fait l’objet de deux amendements de fond proposés par Daniel Gibbs – ont en revanche fait l’objet de débats en commission des Lois le 3 juin, puis dans l’hémicycle jeudi.
Premièrement, comment faire participer la collectivité aux compétences conservées par l’État ? « La Constitution permet aux collectivités autonomes de prendre des actes dans les domaines de compétences que l’État conserve mais sous le contrôle préalable strict de ce dernier. Le statut de Saint-Barthélemy organise notamment cette participation dans le domaine pénal pour permettre à la collectivité d’édicter des sanctions en cas de violation de sa réglementation spécifique, par exemple en matière d’urbanisme, d’environnement ou de tourisme. Dans cette procédure, le contrôle préalable par l’État est essentiel. C’est lui qui garantit que la compétence n’est pas transférée. Le Conseil constitutionnel a eu plusieurs fois l’occasion de sanctionner telle forme de contrôle qui serait trop laxiste. Or, dans le cas de Saint-Barthélemy, la procédure ne fonctionne pas depuis 2008 car les gouvernements qui se sont succédé ont pris la mauvaise habitude de ne pas prendre les décrets validant ou rejetant les propositions d’acte de la collectivité. Il n’y a donc ni acceptation, ni refus : les délibérations se suivent et restent lettre morte ! » explique ainsi Daniel Gibbs, rapporteur du texte. « Personne ne peut considérer que cette situation soit acceptable. On peut comprendre qu’il y ait un encombrement de délibérations au ministère entraînant des retards, cela oui, mais une absence de décision pendant des années, cela revient à paralyser totalement la procédure prévue dans la Constitution et que le Parlement a déclinée précisément dans la loi organique ! Il faut donc sortir de l’impasse ».
Décrets : sortir de l’impasse
Lors des débats au Sénat, les auteurs de la proposition de loi avaient demandé que le contrôle préalable de l’État soit levé : cette solution, inconstitutionnelles, n’avait pas été retenue. Daniel Gibbs a donc préféré déposer un amendement ne modifiant pas une procédure que la Constitution encadre fortement, mais permettant de faire en sorte que les gouvernements la respectent. « Mon amendement tend à maintenir la procédure actuelle, mais en permettant à la collectivité de saisir le Conseil d’État pour qu’il enjoigne le Gouvernement lorsque celui-ci persiste à ne pas trancher dans les délais impartis ». En clair : si l’Etat ne prend pas les décrets pour Saint-Barthélemy dans les délais organiques, Il sera le débiteur de la jeune Collectivité.
D’abord repoussé en commission, l’amendement Gibbs a finalement trouvé ses défenseurs dans les rangs des parlementaires qu’il a su convaincre. Jean-Jacques Urvoas, Président de la commission des Lois de l’Assemblée a ainsi rappelé que « le délai moyen de publication des décrets tourne autour de huit mois et cinq jours. De cette situation, nous portons tous la responsabilité (…). La collectivité de Saint-Barthélemy subit depuis longtemps les conséquences de cette situation. La mesure que propose le rapporteur (…) facilitera la gestion quotidienne de la collectivité ».
Sécurité sociale : Gibbs contraint l’Etat à respecter ses promesses
Autre sujet très sensible, balayé par le Sénat puis par la commission des Lois de l’Assemblée nationale : celui de la gestion locale du régime de sécurité sociale, tant problématique à Saint-Barthélemy. Daniel Gibbs a tenu à proposer un amendement tentant de mettre en œuvre la demande de Saint-Barthélemy et la promesse du Chef de l’Etat en déplacement sur l’île au mois de mai dernier qui s’était prononcé « pour » la création d’une caisse locale de Sécurité sociale pour le territoire. Le député de Saint-Barthélemy et Saint-Martin a ainsi obtenu qu’à titre expérimental et pour une durée de trois ans, l’État puisse habiliter la collectivité de Saint-Barthélemy à participer, sous son contrôle, à l’exercice de la compétence en matière de Sécurité sociale dans le seul but de faire émerger une gestion locale du régime général de la Sécurité sociale.
D’abord réfractaires, les parlementaires ont suivi le rapporteur Daniel Gibbs dans sa démarche. « Après en avoir discuté avec le rapporteur, nous avons décidé de l’accompagner dans son choix. Suite à la déclaration du Président de la République à Saint-Barthélemy, nous voulions lever toute ambiguïté : nous sommes bien d’accord sur le fait qu’il s’agira d’une caisse installée, et non d’une antenne de la caisse de Guadeloupe. Avec René Dosière et Daniel Gibbes, j’ai eu l’occasion de conduire une mission à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin : nous avons observé que, lorsque la collectivité et l’État avaient conclu des accords prévoyant la présence d’une antenne, alors même que la collectivité mettait à disposition des moyens, cela n’avait pas pu fonctionner. Constatant que cette tentative n’avait pu aboutir, il nous a paru opportun d’étudier d’autres hypothèses. De fait, nous allons accompagner le rapporteur dans sa volonté d’expérimentation, une démarche que la commission des lois aime beaucoup » a notamment appuyé le président de la commission des Lois pendant les débats en séance publique.
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