Un comité s’organise autour de la famille Minville qui se considère spoliée de son bien

Igor Rembotte
Par Igor Rembotte 4 Mar 2015 12:50

Un comité s’organise autour de la famille Minville qui se considère spoliée de son bien

L’affaire est lourde, elle a été longue et le jugement est tombé en février 2014 :  Madame Narcisse Odette MINVILLE, 82 ans, et Monsieur Jean-Albert MINVILLE, 86 ans, consorts MINVILLE Charles Léonel ont été condamnés en février 2014 à payer à la société des Hôtels Caraïbes :

  • La somme de 116.200,00 euros à titre d’indemnité d’occupation entre le 25 mai 2000 et le 25 janvier 2014
  • La somme mensuelle de 700,00 euros à titre d’indemnité d’occupation à compter du 25 décembre 2013, ce jusqu’à libération effective complète des parcelles
  • La somme de 6000,00 euros sur le fondement de l’article 700 de code de procédure civile
  • Et aux dépens qui seront recouvrés conformément à l’article 699 du code de procédure civile

Cette condamnation scelle surtout le fait que la famille Minville n’est pas propriétaire de ces parcelles qu’elle occupe pourtant depuis plusieurs générations.

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Ayant épuisé tous les recours possible ou presque, la famille Minville a donc décidé tout d’abord d’adresser un long courrier soutenu à Madame la Ministre de la Justice et Garde des Sceaux mais surtout d’organiser un comité de soutien localement pour que ce cas, qui n’est à Saint-Martin pas isolé, trouve une tribune et le moyen d’être la pierre fondatrice d’un mouvement qui permettrait aux saint-martinois ou à certains saint-martinois de ne plus subir l’expression d’un droit commun qui n’a pas forgé le territoire et dans lequel ils ne se reconnaissent pas forcément.

L’affaire est complexe et nous ne rentrerons pas ici dans son détail d’autant qu’elle a trouvé conclusion dans ce jugement. Pour autant la lecture de la lettre de la famille Minville qui vous est proposée en pièce jointe résume bien leur position, le sentiment d’injustice et la conviction que d’avoir été spoliée d’un bien dont ils disent jouir depuis au moins 80 ans.

“Plus aucun saint-martinois ne sera chassé de chez lui, je m’en porte garant (…), les saint-martinois ne sont pas de ânes !” Tua Jah Bash
Sur un autre plan, le meeting qui était organisé en fin de semaine dernière a aussi permis d’identifier les membres originels du comité de soutien et d’entendre certains d’entre eux exposer les motifs qui ont fait naître cet élan de solidarité. Ce point presse n’était qu’un premier pas et d’autres suivront sans doute, les plus “radicaux” des membres du comité allant jusqu’à prôner qu’une marche soit organisée et qu’elle trouve pour point d’arrivée la Collectivité dont les élus ne défendraient pas assez l’intérêt des familles saint-martinoises (dixit Tuzza Jah Bash) : “Occupons la Collectivité et faisons en sorte d’élire de nouvelles personnes” lancé comme un avertissement, sans doute un peu galvanisé par le moment.

Plusieurs personnalités étaient présentes pour cette première prise de parole, nous noterons les interventions de Jules Charville Président de True Hope For St Martin et Conseiller Territorial posé en MC, de Tuzza Jah Bash Président de l’association Solidarity Rastafari, de Raymond Helligar, de Julien Gumbs, d’Aline Choisy et de Daniella Jeffry. L’allocution de Madame Jeffry ne manque pas d’intérêt puisque par le prisme de l’histoire elle permet de mieux comprendre ce que la famille Minville dit subir.

Quoiqu’il en soit, et si c’est effectivement une famille historique de Saint-Martin qui “subit” un droit commun qui n’a pas su intégré celui plus naturel qui s’exprimait avant lui, c’est surtout le sempiternel dossier des 50 pas géométriques qui refait surface concomitamment à celui des successions saint-martinoises qui peinent à trouver leur chemin.

Ainsi, Madame Jeffry entame-t-elle son discours par une courte phrase mais qui résume à elle seule la fracture qui existe aujourd’hui plus qu’hier entre Saint-Martin et la France via la Guadeloupe : “Et si Saint-Martin n’était pas français.”

La position de Madame Jeffry, toujours appuyée sur une histoire qu’elle connait mieux que beaucoup d’autres, est simple : le droit commun qu’impose la France à Saint-Martin est en total inadéquation avec le droit naturel qui a prédominait localement avant que l’Etat/la République/le Gouvernement ne décident d’y poser une administration en 1963. Avant cela, la représentation française était tout à fait légère puisque Saint-Martin n’était pas source de matière première ou de richesses antillaises pour le colon.

Quoiqu’il en soit, son discours vous est aussi proposé en message audio, nous vous en recommandons l’écoute, son contenu est tranchant, habité comme l’est Madame Jeffry et plein de références à une histoire qui échappe par trop souvent aux “nouveaux venus”.

Pour l’anecdote, rappelons que Madame Daniella Jeffry a été faite Chevalier de l’ordre national du Mérite en 2013, que les mauvaises langues y voyaient une volonté que de l’inviter à un peu de retenue verbale… Si effectivement Madame Jeffry a pu nous signifier qu’elle avait bien annoncé au Préfet sa volonté que ne plus s’investir politiquement, elle a aussi été claire à dire qu’elle serait toujours présente et active lorsqu’il s’agit de défendre son île.

En conclusion, parce que Daniella Jeffry assure que les saint-martinois de toujours se sentent eux aussi et ensemble agressés par cette décision de justice, comme un cri de ralliement, c’est un “Je suis Minville” qui est lancé.

 


Igor Rembotte
Par Igor Rembotte 4 Mar 2015 12:50