Plaidoyer pour un plan de développement économique

Yves KINARD
Par Yves KINARD 26 Sep 2012 16:34

Plaidoyer pour un plan de développement économique

Cet article pourrait prendre la forme d’un appel à Mr le Président Richardson. En effet, depuis cinq mois que la nouvelle équipe a pris les commandes, tout le monde attend la parole salvatrice qui va décider de notre avenir. Et rien ne vient. Quand je dis nous, ce n’est pas seulement nous les habitants de l’île, c’est aussi les investisseurs qui attendent de voir avant de se décider ou non à investir ici.

Au hasard des rencontres et des discussions, le même leimotiv revient dans les conversations: “qu’est-ce que tu en penses toi de l’avenir?” Et les réponses sont invariablement les mêmes. D’une part la constatation de l’inévitable ruine, et de l’autre l’attente de décisions de la Collectivité. Pendant ce temps le commerce s’effrite, d’autres ferment ou partent en partie hollandaise qui continue d’apparaître comme un Eldorado en fonction de ce qui semble être un dynamisme économique alimenté par des grands projets. Aujourd’hui c’est le pont sur le lagon, l’autre jour c’était l’annonce d’un projet de construction d’un grand stade à Philipsburg ainsi qu’un circuit automobile pour ajouter une orientation touristique inédite. Demain, c’est un projet dont j’ai entendu parler vaguement, mais qui ressemble furieusement à mon idée de village écologique sur la colline, mais en partie hollandaise. Et pendant ce temps, que faisons-nous? Nous attendons toujours que la Collectivité dise quelque chose. Bien sûr, on comprend bien que plusieurs dossiers ont mobilisé les élus: inventaire de la situation et bonne compréhension de la situation, mais aussi apparemment celui de l’éducation, sans oublier les démarches angoissées pour tenter d’obtenir une aide de l’Etat. Aide, entre parenthèses, dont je ne suis pas sûr qu’elle relance l’économie puisque j’ai cru comprendre qu’elle allait surtout permettre à la Collectivité de payer certaines de ses dettes, tout en accumulant une autre, en reportant donc l’échéance. Pourquoi pas puisque cela donne de l’air, mais il ne faudrait pas tarder à trouver un moyen de renflouer les caisses.

Aujourd’hui, ce qui manque cruellement, c’est un vrai plan économique. En d’autres termes, que la Collectivité se positionne sur une orientation dans laquelle les investisseurs locaux ou des nouveaux pourraient s’engouffrer. Par exemple, la base de ce plan serait de définir si oui ou non, nous continuons à miser sur le tourisme et surtout le ou lesquels. Ensuite, quel axe privilégions-nous: les hôtels, la plaisance, laquelle, ou tout ensemble? Enfin que faisons-nous pour assurer à l’investisseur une visibilité économique et fiscale.

Reprenons la première question: il est indubitable que notre seule chance est de continuer à miser sur le tourisme, même si ce mot peut recouvrir différentes réalités. Essentiellement, il restera le moteur de notre économie. Beaucoup de gens continuent à aimer Saint Martin et avant que la lassitude ne les gagne définitivement, il faut relancer la machine. Donc, pour 80%, on mise sur le tourisme, étant bien entendu que la branche recouvre non seulement les nuitées, mais aussi toute l’économie induite comme l’entretien, les services, les magasins, les restaurants, etc…

Les 20% restant doivent définir d’autres orientations comme le commerce inter îles, le développement de la plate forme de Galisbay et l’aéroport de Grand Case ainsi que quelques industries de transformation locales.

Deuxième question, que faisons-nous? L’idéal est plutôt de miser sur le développement d’outils plutôt que sur la promotion. Avant de le faire, il faut améliorer le produit, le rendre plus attractif, travailler sur tout l’environnement. Au rang des outils, il faut réhabiliter les hôtels qui en ont besoin, élever le standing de certains autres, créer de l’attractivité avec par exemple un parc d’attraction, une route paysagère, le Front de Mer, etc… On parle ici d’orientation, d’incitation, puisqu’il n’est pas question que la Collectivité investisse, mais, et on en arrive à la troisième question, qui est de savoir ce que nous faisons pour faciliter et sécuriser l’investissement. On doit donc revoir notre fiscalité, la reconstruire sur d’autres bases pour élargir l’assiette et reporter sur un plus grand nombre les coûts de fonctionnement de la Collectivité tout en donnant une visibilité à 20 ou 30 ans qui garantisse la pérennité d’une orientation, seule à même d’inciter et de fixer l’investissement.

C’est donc tout cela que le monde économique et les habitants attendent avec impatience. Les propositions, les idées existent. Je rappellerai pour mémoire mes précédents articles comme celui où je dépeignais dans une nouvelle le Saint Martin de 2025 , les trois volets qui traitaient de l’économie de Saint Martin ou encore celui qui proposait un modèle fiscal . Et je ne suis pas seul à avoir des idées comme je le constate au hasard des discussions. Donc, Mr le Président, de grâce, construisez un plan de développement économique et mettez les outils en place. Bientôt, il sera trop tard. Vos administrés commencent à désespérer et à quitter le navire, offrant de plus en plus l’image d’une île sinistrée peu à même de convaincre le tourisme.

Yves KINARD

Yves KINARD
Par Yves KINARD 26 Sep 2012 16:34